La kinésiophobie, c’est la peur excessive et irrationnelle, c’est à dire injustifiée médicalement, que certains mouvements et activités physiques puissent aggraver notre douleur. Les éviter systématiquement peut avoir des conséquences nocives sur notre corps et notre forme à long terme.

Pour surmonter la kinésiophobie et tous les conditionnements inconscients associés, il est tout d’abord fondamental d’avoir eu l’avis rassurant d’un médecin. Il est en effet essentiel d’être convaincu qu’il n’y a aucun danger réel à refaire le mouvement ou l’activité qui nous fait peur.

Il s’agit alors ensuite de le/la reprendre progressivement, par tous petits pas si besoin, et par la répétition. C’est une sorte de reprogrammation du cerveau, seul ou avec l’aide d’un psychologue / physiothérapeute / kinésithérapeute.

Qu’est ce que la kinésiophobie ?

Cet article en parle plus en détails:

« Plus précisément, la kinésiophobie se rapporte à la peur excessive et irrationnelle de faire certains mouvements. Cette peur est alimentée par la crainte que le mouvement entraîne une augmentation de la douleur ou l’apparition d’une nouvelle blessure. La personne devient alors hypervigilante et surveille de près toute sensation ou apparition de douleur au quotidien. »

Wikipédia a aussi une page consacrée à cela, en anglais seulement  : kinesiophobia. En voici la traduction :

 

La kinésiophobie selon Wikipedia (anglophone)

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« La kinésiophobie est la peur de la douleur due au mouvement.

C’est un terme utilisé dans le contexte de la médecine de réadaptation / kinésithérapie. La kinésiophobie est un facteur qui entrave la rééducation et prolonge en fait l’incapacité et la douleur. 

La kinésiophobie peut être un facteur d’augmentation du temps de retour à la participation aux activités pré-lésionnelles. Il a été démontré que des niveaux plus élevés de kinésiophobie sont liés à un manque de réintégration dans les activités pré-lésionnelles. 

Une méta-analyse de 2020 a montré que l’entraînement physique est efficace pour réduire la kinésiophobie, y compris chez les personnes souffrant de lombalgies. 

Hanel, Joshua; Owen, Patrick J.; Held, Steffen; Tagliaferri, Scott D.; Miller, Clint T.; Donath, Lars; Belavy, Daniel L. (18 September 2020). « Effects of Exercise Training on Fear-Avoidance in Pain and Pain-Free Populations: Systematic Review and Meta-analysis ». Sports Medicinedoi:10.1007/s40279-020-01345-1.

 

Une vidéo explicative

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Une peur qui peut être justifiée

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Bien sûr dans certains cas cette peur du mouvement est justifiée initialement car notre corps a une blessure réelle qu’il faut protéger.

On espère alors qu’elle va bien se réparer, et le corps a une capacité extraordinaire pour ça !

C’est le cas quand on se casse le tibia par exemple, ou qu’on a des « points de suture » suite à une opération ou une coupure.

On évite de solliciter la partie du corps blessée le temps que l’os se reconstruise ou que la plaie se referme. D’autre fois, les dégâts sont si importants que le corps ne parviendra pas à se réparer complètement et il faudra tenir compte de cette fragilité pour choisir les activités appropriées.

 

Les conditionnements

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Mais dans un grand nombre de cas de douleurs chroniques qui durent depuis des mois, des années, il n’y a pas/plus de gros dégâts qui justifieraient une telle précaution. Il n’y a pas de danger réel dans le mouvement qui nous fait peur.  Le corps a eu tout le temps de se réparer. Bien sûr l’avis d’un médecin est essentiel pour le confirmer.

C’était mon cas, j’ai fait suffisamment d’IRM, de scanners et de radios pour savoir qu’il n’y a pas de danger réel pour moi à faire des mouvements ou des efforts soutenus. Et pourtant la douleur que je ressens est réelle, ça fait vraiment mal.

 

La fuite

L’appréhension que j’ai pu ressentir à la simple idée de faire certains exercices venait de nombreuses expériences où ma douleur avait fortement augmenté suite à ces activités. Je les ai assimilés à des “triggers” =  déclencheurs. Et un réflexe tout à fait normal est donc de les éviter. Tout le temps. La fuite. Et ça aggrave le problème, on rentre dans des réponses conditionnées…

 

Conditionnements inconscients

Alan Gordon explique bien les réponses conditionnées dans l’étape 18 de son programme. Notre système nerveux peut associer de manière erronée un signal de danger à quelque chose qui n’est pas dangereux.

Et ça peut être difficile d’accepter ces conditionnements erronés, que notre système nerveux se mette en alerte de manière exagérée. On ne l’a pas choisi, on le subit et on peut avoir du mal à le comprendre. 

Mais aucune raison de culpabiliser pour tout cela.

Notre douleur est réelle, nos craintes sont légitimes. Et le problème, c’est surtout qu’on ne peut pas décider d’arrêter ces conditionnements par une simple pensée consciente. On ne peut pas modifier directement ces fonctionnements inconscients qui nous envoient de la douleur de manière inappropriée.

Mais on peut très progressivement les désapprendre à notre cerveau, par une sorte d’entrainement de renforcements positifs.

L’attaque

Mais mieux vaut éviter de se mettre la pression pour se débarrasser le plus vite possible de ces conditionnements, en y allant trop fort. Aller en frontal contre eux, forcer quand même, aller au delà de ce qu’on peut supporter pour prouver qu’on est plus fort qu’eux, ça ne marche pas.

L’attaque frontale ne fait qu’aggraver le problème. Parce que notre système nerveux sent ça comme un danger supplémentaire et se met encore plus en alerte. Cela ancre encore plus le conditionnement inconscient.

 

Rassurer notre système nerveux

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La fuite et l’attaque frontale n’étant pas la solution, il y a une autre approche possible :  avancer par tous petits pas pour pouvoir rassurer notre système nerveux. Ne pas forcer, écouter son corps, sentir quand s’arrêter. Et donc surtout pas de perfectionnisme ici, on n’a pas à réussir vite, il faut suivre son ressenti.

Alan Gordon parle ainsi de l’exposition graduelle et des petits pas dans l’étape 11 de son programme Pain Recovery : Reconditionnement de la douleur et exposition graduelle. Dans la vidéo plus haut, Denis Fortier suggère lui aussi de reprogrammer son cerveau par des exercices simples, avec moins d’amplitude, mais aussi d’utiliser la visualisation ou la réalité virtuelle.

Dans l’application Curable, on nous suggère même de commencer par juste regarder des vidéos de personnes faisant le mouvement qui nous peur – et de calmer notre système nerveux s’il se met en alerte.

L’essentiel, c’est se connecter à son corps avec bienveillance, lui faire confiance tout en le rassurant, lui dire qu’on ne veut lui faire aucun mal, aucune violence, qu’il n’y a pas de danger. 

 

Apprivoiser : « Il faut être patient »

C’est un peu comme si on devait apprivoiser ces peurs et ces conditionnements. C’est l’image que prend Lorimer Moseley, un neuroscientifique australien réputé sur la douleur chronique dans “tame the beast”.

Il compare la douleur chronique à un animal sauvage qu’on peut apprivoiser, apaiser. Et ça me fait penser à l’histoire du renard dans LE PETIT PRINCE de Saint-Exupéry (Ch. XXI). “Il faut être très patient.” Chaque jour, se rapprocher un petit plus. Donner de son temps. Ne rien forcer. Avoir des rites…

J’ai fait beaucoup de progrès avec cette approche. Je fais aujourd’hui sans problème des mouvements qui me provoquaient de l’angoisse rien qu’à l’idée de les faire il y a deux ans…

 

Mon expérience

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Pendant 8 ans, j’ai eu des tensions dans tout le haut du corps. Mes muscles étaient toujours tendus, en particulier les trapèzes, les épaules, la nuque : toujours crispés, douloureux quand on les touchait. Je n’osais plus bouger la tête, ça me faisait trop mal, avec des vertiges.

J’ai fini par être complètement bloquée, avec une véritable appréhension du moindre mouvement de ma tête.

Les séances de kiné ne résolvaient pas le problème car elles étaient trop fortes et mes céphalées redoublaient d’intensité ensuite. J’en étais arrivé à fuir tout mouvement ou exercice qui me paraissait « dangereux », c’est à dire pouvant aggraver ma douleur. Les massages très doux me soulageaient un peu, mais pas pour très longtemps.

Un comportement nocif à long terme

Mais un jour un nouveau médecin m’a mise en garde que je ne pouvais pas continuer comme ça. Cette absence de mouvement dans tous ces muscles soutenant ma tête était très nocive pour moi et empirait les choses. Mes muscles se rigidifiaient et mes conditionnements augmentaient.

30 secondes toutes les heures

Et le conseil qu’elle m’a donné a fonctionné : toutes les heures, chaque jour, remettre tout doucement ces muscles en mouvement, sans forcer, sans provoquer de douleur qui resterait. Il s’agissait donc de petits exercices très très doux et simples, à faire en autonomie.

Grâce à Curable j’avais en parallèle compris qu’il n’y avait rien de grave ni dangereux à remettre ces muscles en mouvement. Alors j’avais confiance et j’y suis allée très doucement et sereinement.

Très progressivement la rigidité et les vertiges ont disparu. Il aura fallu deux mois pour faire une vraie différence, aucun miracle d’un coup. J’ai pleuré de joie quand j’ai enfin pu tourné ma tête sans peur et sans aggraver ma douleur ! Aujourd’hui je ne fais plus ces petits exercices, et je peux toujours bouger la tête librement et sans appréhension : mon cerveau s’est réellement reprogrammé.

Je peux à nouveau refaire certaines activités que je n’osais plus faire.

J’ai ainsi réussi à lever d’autres conditionnements : 

  • pouvoir monter en cardio sans me prendre une grosse douleur à la tête dans la minute
  • faire du vélo sans avoir peur que des chocs, des trous dans le chemin… aggravent mon mal de tête
  • pouvoir lever les bras et les étirer vers le haut sans peur et sans douleur (un exercice de Yoga avec Marion qui me paniquait au départ).

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